En l’espace d’une trentaine d’années, le mécénat d’entreprise en France est passé de minorité à norme. De nos jours, nombreuses sont les enseignes privées disposant d’une collection artistique ou patrimoniale mais cette tendance n’est apparue que dans les années 80.
Aux États-Unis, les organisations ont commencé à se pencher sur cette pratique dès la fin du XIXe siècle. Parmi les précurseurs, les compagnies de chemins de fer comme Union Pacific et Atchison Topeka Santa Fe Railroads passaient des commandes d’œuvres auprès d’artistes afin de vendre les mérites des transports ferroviaires.
L'exemple novateur d'IBM
En 1939, IBM, importante société dans le domaine de l’informatique, innove en misant sur l’art pour se démarquer. Le président Thomas J. Watson décide de participer à la New York World’s Fair et commande 79 œuvres à des artistes : une pour chaque pays dans lequel la compagnie opère. Il expose cet ensemble dans la Gallery of Science and Art, aux côtés de 300 de ses ingénieurs. Plutôt inédit pour l’époque!
Cet exemple est largement suivi dans les années 60 par un grand nombre de sociétés majeures. Notons l’exemple de Philip Morris, leader mondial dans l’industrie du tabac, qui finance l’exposition “Pop and Op” en 1965 avant de devenir un mécène majeur du monde de la danse et de l’opéra.
Des pizzas et du design
Tout aussi intéressante est la fascination de Tom Monaghan, fondateur et président de Domino’s Pizza, pour l’architecture et plus précisément pour le concepteur Frank Lloyd Wright. Ce richissime pizzaiolo a amassé une impressionnante collection (dessins, vitraux, correspondance, meubles…) qu’il a conservée à la Domino’s Farm, siège social de la compagnie situé dans le Michigan. Ce patrimoine est aujourd’hui ouvert au public et visible gratuitement, une aubaine pour les amateurs de design!
À la fin des années 90, la moitié des 500 premières compagnies américaines possèdent leur collection, la tendance est lancée.
La France entre dans la danse
En France, l’emprise de l’État sur la culture est plus importante. Cet élément peut expliquer pourquoi les entreprises se sont mises à collectionner et à utiliser l’art plus tardivement.
Il y a pourtant une exception de taille : la collection d’art moderne de Renault, constituée entre 1967 et 1985, riche de quelques 300 œuvres d’artistes majeurs comme Arman, Dubuffet, Vasarely, César… Au-delà de son aspect avant-coureur, la démarche de l’entreprise est atypique. Au lieu d’acheter des œuvres toutes faites, le leader de l’industrie automobile met en place une collaboration active avec les artistes et met à leur disposition un soutien technique, logistique et humain. Ainsi, Renault fournit des pièces automobiles à César pour ses expansions ou encore des conseils d’ingénieurs pour répondre aux questions de Vasarely.
Depuis, de nouvelles mesures ont été mises en place afin de créer un environnement favorable au mécénat, comme par exemple la loi Aillagon en 2003. La constitution de collection d’entreprise a également été largement stimulée par la mise en place d’une fiscalité incitative pour les entreprises achetant de l’art contemporain.
Résultat, les achats d’œuvres d’art effectués dans le cadre de collections d’entreprise se sont assez largement développés et sont passés selon les estimations du Ministère des finances de 3 millions d’euros en 2005 à 21 millions d’euros dix ans plus tard.
Crédits photo :
© M. Paul M. Van Dort
© Groupe Renault
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